Bien que l’initiative de transférer des patients dans les ressources intermédiaires (RI) pour désengorger les hôpitaux soit louable, il n’en reste pas moins qu’elle pose de sérieux problèmes. Le recrutement d’employés compétents en RI est un casse-tête de tous les instants.
Soins à donner exigeants
Les RI reçoivent de plus en plus de clients, mais la main-d’œuvre qualifiée manque. Les dirigeants de RI considèrent d’ailleurs ce problème comme le plus crucial. Les RI accueillent des personnes de qui prendre soin exige des compétences certaines et l’accomplissement de tâches parfois difficiles.
En effet, les soins physiques et psychologiques donnés aux résidents sont plus importants en nombre et en complexité, étant donné la perte d’autonomie sévère de ces derniers ou leurs troubles cognitifs. Certains facteurs freinent donc le recrutement de préposés ou d’employés préparés à l’ouvrage.
Facteurs de résistance de la main-d’oeuvre
Le premier, et probablement le plus représentatif, de ceux-là est le salaire accordé aux ressources humaines. Pour s’occuper des patients, les employés sont rémunérés entre 11,25 $ et 13 $ l’heure, ce qui équivaut au salaire d’autres emplois beaucoup moins exigeants. « À ce salaire-là, les gens se disent qu’ils vont être mieux dans un McDo », a soulevé la directrice générale de l’Association des ressources intermédiaires d’hébergement du Québec (ARIHQ), Johanne Pratte.
Conséquemment, l’autre facteur qui éloigne les chercheurs d’emplois est la charge de travail et les manœuvres auxquelles ils doivent se livrer. À titre d’exemple, il arrive que des préposés aux bénéficiaires doivent jouer le rôle d’infirmier. Ils administrent ainsi des médicaments, font des prélèvements, posent des sondes, etc. La loi 90 permet à des non-professionnels d’effectuer des opérations normalement réservées à des professionnels, et les employés des RI sont concernés par cette loi.
La qualité des soins n’est pas optimale
Mais un malaise se fait sentir chez ceux qui doivent poser des actes pour lesquels ils ne sont pas formés. L’inquiétude s’installe également chez les dirigeants et les propriétaires de RI quant à la qualité des soins prodigués. Et, bien sûr, cela a des répercussions sur la clientèle elle-même.
À l’occasion, des clients doivent même être retournés en CHSLD ou dans un hôpital. Quelques-uns aussi sont remis aux policiers mieux aiguillés pour gérer des situations potentiellement graves.
Formation des employés
Pour pallier au mieux le manque de ressources qualifiées, les RI proposent souvent de former leurs employés à leurs frais. Cela va de pair avec l’augmentation de la qualité des soins, mais bien vite les personnes en fonction se tournent au final vers le réseau public, où le salaire est plus séduisant.
C’est donc un cercle vicieux, et les RI sont constamment aux prises avec un problème majeur de recrutement. Madame Pratte juge, en ce sens, que le gouvernement et le ministre Barrette, qui a récemment annoncé la disponibilité de nouvelles places dans les RI, désengorgent « à rabais » le réseau public. « Le réseau confie des personnes vulnérables aux RI. La moindre des choses, c’est de s’assurer que les employés ont la formation et la compétence pour s’en occuper », soutient Mme Pratte. Or, ce n’est pas le cas.
Économies favorables?
Il est certain qu’à 100 $ par un jour pour un lit en RI, comparativement à 1200 $ pour un lit à l’hôpital et 300 $ pour un lit dans un centre d’hébergement et de soins de longue durée, le gouvernement économise gros. Mais à quel véritable prix?
L’ARIHQ, dans ce contexte, a décidé de dresser un état des lieux du recrutement et de la qualification des ressources humaines qu’elle chapeaute. Dans le cadre de la négociation actuelle avec le ministère de la Santé en vue du renouvellement de son entente nationale, ce portrait révélateur était nécessaire.